Jussy, Geneva
CHF4'950'000.-
530 m2
Village house - 11 Rooms - 5 bedrooms
Evènements & Actualités
Antépénultième jour férié de l’année – Genève en compte neuf en 2020 -, le jour du Jeûne genevois coïncide avec le jeudi qui suit le premier dimanche de septembre dans le calendrier de la Cité de Calvin. La tradition veut qu’on y déguste une fameuse tarte aux pruneaux à la suite d’une journée d’actions de grâce et de pénitence. Quid de ses origines ? Retour sur une date du calendrier très spéciale pour la cité de Calvin et ses habitants.
Les historiens ne s’accordent pas complètement sur les origines précises de ce « jour de grâces » genevois, mais, comme nous l’indique ici le magazine Le Temps : « il est d’usage de faire remonter l’origine du premier jeûne documenté à Genève à l’année 1567 en signe de solidarité avec les protestants de Lyon victimes de répression. »
À cette époque, on avait l’habitude de faire coïncider un événement grave – une guerre, un épisode de famine ou d’épidémie – avec un jour de pénitence. La proximité de Genève avec Lyon pourrait expliquer cette forme de solidarité. On a tendance donc un peu vite à attribuer sa paternité au massacre de la Saint-Barthélemy, survenu fin août 1572, quelques années après les drames de Lyon déjà commémorés par les genevois réformés.
Dans tradition protestante, la pratique du jeûne serait aussi un acte moral et une forme de transformation de soi par l’abstinence. Elle inciterait plus ardemment à la prière selon les mots de Calvin même. On sait qu’elle est également et plus généralement pour l’Église une forme de solidarité avec les plus démunis, car en jeûnant, on est un peu moins « remplis de nous-mêmes. »
C’est bien connu la République du bout du Lac ne fait rien comme les autres cantons helvétiques. Ceux-ci célèbrent en effet leur jour de jeûne, aux origines réformées lui aussi, le troisième dimanche de septembre, en décalage avec les irréductibles genevois. Alors comment en est-on arrivé à cette énième « Genferei » qui fait doucement sourire nos voisins confédérés chaque fin d’été ?
Dans les autres cantons protestants, les jours de jeûne institués ne faisaient pas exception à la règle. Au XVIe siècle par exemple, les épisodes de peste de Bâle et Berne ainsi qu’une disette à Zürich font instituer des jours de pénitence par les gouvernements cantonaux. À force d’événements extraordinaires et récurrents, les cantons réformés décident de jeûner à un rythme annuel, généralement en septembre. Les catholiques, eux aussi, suivent le mouvement au cours du XVIIe siècle.
Le gouvernement fédéral de l’époque fixe, sur proposition du canton d’Argovie, un jour de Jeûne fédéral officiel. D’abord institué le 8 septembre, il est ensuite déplacé au troisième dimanche du mois. Faisant fi de cette décision, Genève décide de conserver son jour de jeûne particulier. Il est officialisé en 1840 et fixé le jeudi – unique jour de la semaine sans marché – suivant le premier dimanche de septembre. On peut aisément comprendre l’attachement des genevois à leur pratique si l’on envisage le jeûne sous un angle patriotique, comme forme de résistance, notamment à l’occupation catholique napoléonienne du début du XIXe siècle.
Dans une époque qui fait la part belle aux régimes, le sens religieux de la célébration s’est aujourd’hui dilué. L’Église a encadré la pratique de manière irrégulière au fil des ans et le sens patriotique s’est imposé. Au final, le Jeûne genevois fait le bonheur des écoliers et des travailleurs, le jour étant institué comme férié officiel dans la République depuis les années 60. Certains commerces et institutions font même « le pont » et demeurent fermés jusqu’au lundi suivant, au grand dam de nos voisins qui ignorent encore cette particularité genevoise. Mais la tarte aux pruneaux dans tout ça ?
Et bien il faut revenir à la signification religieuse du jeûne des débuts de la Réforme. Souvenons-nous de la croyance qu’un ventre vide nous mettrait dans de meilleures dispositions pour nous élever spirituellement. Économiser un repas permettait également à l’Église de mettre de côté pour les plus défavorisés. La tarte aux pruneaux, fruit de saison s’il en est, pouvait assurer cette fonction d’unique « repas léger », à la suite d’une journée passée à l’église par exemple. Plus tard, sa consommation fut permise le midi et il était coutume alors de la préparer la veille.
Aujourd’hui, la pratique du jeûne par conviction religieuse s’est raréfiée. Certains restaurants de la Cité de Calvin n’hésitent cependant pas à fermer les portes de leur établissement ce jour-là. Renseignez-vous bien avant de tenter une sortie sous peine de réellement rester le ventre vide. Généralement, le temps encore doux est propice aux loisirs en extérieur et aux escapades champêtres. La tarte aux pruneaux, elle, constitue toujours le point d’orgue de cette journée genevoise pas comme les autres.
Pascal Viscardi
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